Le projet se présente en deux volets, le premier proposant la pose de pavés de mémoire rue Haute et le second l’apposition de plaques murales sur les façades d’Établissements scolaires du quartier des Marolles.

A) Pavés de mémoire à poser rue Haute

« La meilleure façon d’honorer les morts est de rappeler leur existence »

Le quartier des Marolles a accueilli, dans les années trente, de nombreux réfugiés fuyant les pays où le nazisme et l’antijudaïsme leur rendaient la vie impossible. Durant la Seconde Guerre mondiale, plus de 25.000 personnes d’origine juive furent déportées de Malines vers Auschwitz par l’occupant. En mémoire des victimes du nazisme, cette première partie du projet proposait la pose, de la place de la Chapelle à la Place du Jeu de Balle, de pavés de mémoire pour des personnes déportées, persécutées pour leur origine et/ou pour avoir été résistante. Les pavés sont scellés sur les trottoirs là où vécurent les personnes déportées, de manière à offrir au passant la vue d’une continuité de pavés.

B) Plaques murales pour les Établissements scolaires des Marolles

« Promouvoir le travail de mémoire chez les élèves »

L’Allemagne nazie, durant la Seconde Guerre mondiale, mit en œuvre chez nous, comme dans tous les pays occupés, sa politique d’extermination des Juifs d’Europe. L’élaboration de ce funeste projet se fit pas à pas, concrètement, par la promulgation d’ordonnances visant à isoler les Juifs du reste de la population, dans la perspective d’une déportation programmée. Cet objectif fut atteint, en Belgique, à l’issue de la mise en application de 17 ordonnances promulguées par l’occupant du 23 octobre 1940 au 21 septembre 1942. L’une d’entre elles, publiée le 1er décembre 1941, stipulait l’interdiction faite aux élèves Juifs de fréquenter les établissements non-juifs à dater du 31 décembre 1941. Bon nombre des élèves écartés de leur école furent ensuite, à partir de l’été 1942, déportés et assassinés à Auschwitz. Une plaque commémorative posée en façade des établissements scolaires concernés vise à permettre aux jeunes générations de prendre connaissance des faits et de réfléchir aux calculs et moyens mis en œuvre par l’occupant pour arriver à ses fins.

C) Budget

Le montant mis à disposition dans le cadre du Budget Participatif 2018 pour la mise en oeuvre du projet étant de 5.000 euros, le financement de 16 pavés de mémoire, de trois plaques murales de petites dimensions et d’une commémoration publique a pu être envisagé.

 

Développement du projet

A) Pavés de mémoire

Recherches documentaires :
• A partir du fichier de l’AJB (Association des Juifs en Belgique créée à l’initiative de la Gestapo) archivé au Musée juif de Belgique, un relevé a pu être fait des « Israélites » domiciliés durant la Seconde Guerre mondiale rue Haute.
• À partir des identités relevées, la consultation du Livre-mémorial de la déportation des Juifs de Belgique a permis de déterminer les personnes qui, parmi celles-ci, ont été déportées.
• Dans le cadre du budget disponible, 16 pavés ont pu être financés. Nous avons opté pour une concentration de pavés au 173 rue Haute où 16 personnes ont été raflées et déportées de 1942 à 1944, en imaginant qu’un tel regroupement attirerait à coup sûr le regard des passants et susciterait leur interrogation.
• Consultation, ensuite, au Service des Victimes de la Guerre (Archives générales du Royaume) des dossiers personnels de ces 16 personnes déportées de Malines vers Auschwitz. Les données récoltées ont permis d’établir les mentions à graver sur les pavés et de relever des indications biographiques. Des enfants et adolescents en âge de fréquenter les écoles du quartier comptent parmi les victimes.

Mentions gravées sur les 16 pavés posés Rue Haute 173 :

Pavés de mémoire Rue Haute 173

pour
FAMILLE BORNSTEIN
FAMILLE POTASIEWICZ – OKSENHENDLER
FAMILLE POSESORSKI – MENDZYLEWSKA
FAMILLE MENDLEWICE – CHARENZOWSKA
SZULIM HOFMAN

 

 

 

 

B) Plaques murales à apposer en façade d’école

Recherches documentaires :
• L’ouvrage de référence décrivant les conséquences de l’ordonnance promulguée par l’occupant stipulant l’interdiction faite aux élèves Juifs de fréquenter les établissements non-juifs à dater du 31 décembre 1941 est plus que probablement celui de Barbara Dickschen, L’École en sursis. La scolarisation des enfants juifs pendant la guerre, Didier Devillez Éditeur, 2006.
• Consultation aux Archives de la Ville de Bruxelles, 65 rue des Tanneurs, des registres d’écoles datant des années 1930 et 1940. Si l’on n’y relève pas les noms des élèves, le nombre d’inscriptions et de désinscriptions durant les premières années de la Seconde Guerre mondiale s’y trouvent consignés pour de nombreux établissements scolaires. Il est notamment question dans ces archives des difficultés que rencontraient les élèves (malnutrition, manque d’hygiène et d’attention générale en classe).
• Il est à noter que les établissements scolaires impliqués dans le présent projet (Emile André, Baron Steens et Charles Buls) n’ont pu retrouver à cet égard de documents relatifs à la période de la Seconde Guerre mondiale au sein de leurs propres archives.

Texte des plaques murales :
Le texte suivant proposé pour inscription sur les plaques murales a été avalisé par le Cabinet de Madame Fouzia Hariche, Échevine de l’Instruction publique, ainsi que par les directions des établissements scolaires concernés. Chacune des trois plaques à présent apposées, d’une dimension de 30 x 30 cm, présente le texte suivant, accompagné des logos de la Ville de Bruxelles et de la Fondation Auschwitz :

De 1942 à 1944, l’occupant nazi a déporté et assassiné à Auschwitz plus de 500 enfants juifs du quartier des Marolles. Parmi eux des élèves de cette école.
Durant la Seconde Guerre mondiale, les nazis ont assassiné plus d’1 200 000 enfants car nés juifs.
Ne les oublions jamais.
Novembre 2019.
Avec le soutien de la Ville de Bruxelles dans le cadre du Budget Participatif 2018, et de la Fondation Auschwitz.

 

Le projet a reçu le soutien de :
• Mémoire d’Auschwitz ASBL, qui souhaiterait poursuivre le développement de ce projet de pose de pavés de mémoire et de plaques mémorielles en façades des établissements scolaires.
• L’Association pour la Mémoire de la Shoah, qui a pris en charge la gestion de la commande des pavés auprès de leur concepteur, Gunter Demnig, et des contacts avec l’administration communale de la Ville de Bruxelles pour l’ouverture des trottoirs et la pose des pavés.
• De la Cellule Bruxelles-Participation et des Échevinats de l’Instruction publique et des Travaux publics de la Ville de Bruxelles, qui ont veillé au bon déroulement du projet.
• Des directions des écoles primaires Émile André, Baron Steens et Charles Buls, de leurs enseignants et de leurs élèves.

 

 Logo Fondation Auschwitz

 

Participation des élèves et cérémonie mémorielle du lundi 25 novembre 2019 (9 à 13h) :
Le projet a été présenté à Mr Philippe Ector, directeur de l’École fondamentale d’application Émile André (Rue Haute, 107), à Mr. Luc Bonneure, directeur de l’École fondamentale Baron Louis Steens (Rue Haute, 255) et à Mme Karima Mellouli, directrice de l’École primaire Charles Buls.

Les élèves des classes de 5eme et de 6eme années ont ensuite été préparés par leurs institutrices, via des leçons données et des discussions échangées en classe, sur ce que fut la Seconde Guerre mondiale et le sort réservé par les nazis aux familles juives. Les élèves, invités à réfléchir à leur participation à l’inauguration des plaques mémorielles et des pavés de mémoire, ont abouti, pour chacune des trois écoles, au souhait d’y prononcer des discours synthétisant les travaux effectués en classes, et de plus, à Charles Buls, à la constitution, par les élèves de 6eme année, d’une chorale. Ceux-ci ont interprété un chant en yiddish, Oyfn Pripitchik, suivi du Chant des Partisans et du Bella Ciao des Résistants italiens.

Rue Haute, 107

L’inauguration des plaques et pavés s’est ainsi déroulée le lundi 25 novembre de 9 à 13h suivant l’horaire convenu avec les établissements scolaires et les services de la Ville de Bruxelles pour la pose des pavés (les plaques ayant été posées par cette dernière le vendredi 22/11) :

9h – pose d’une plaque murale à l’école Émile André ;

9h30 – pose de 16 pavés de mémoire au 173 rue Haute ;

10h15 – pose d’une plaque murale à l’école Baron Steens ;

11h00 – pose d’une plaque murale à l’école Charles Buls. A

À chaque étape de notre parcours des discours ont été prononcés, par l’auteur de ces lignes afin de présenter la nature du projet et l’action en cours, puis par Mr Marcel Zalc, Président de l’Association pour la Mémoire de a Shoah, suivi des discours des élèves, et de ceux prononcés par Mme Faouzia Hariche, Échevine de l’Instruction publique, et par Mr Arnaud Pinxteren, Échevin de la Petite enfance, de la Participation citoyenne et de la Rénovation urbaine. La présence de nombreux parents venus assister à l’évènement et écouter la chorale des élèves de 6eme année à Charles Buls, mise sur pied à l’initiative de sa directrice, Mme Mellouli, et de ses institutrices Mme Lacoste et Mme Chany Charlier, fut appréciée.

Boulevard du Midi, 86

Les directions et les enseignants ont considéré et participé au projet avec la plus grande bienveillance, l’estimant important dans le cadre du devoir de mémoire. Les plaques murales installées devraient permettre au personnel enseignant d’aborder et de développer plus aisément les thématiques liées au projet à l’avenir avec les élèves. Notons que ces écoles avaient déjà abordé l’histoire de la Seconde Guerre mondiale en participant à de précédentes poses de pavés de mémoire. Les élèves de 6eme de l’an dernier de Charles Buls avaient par ailleurs pris part, dans le cadre d’une première chorale, à l’intervention théâtrale de Richard Kalisz, Été 42. Rafle dans les Marolles, donnée à l’Espace Magh du 22 février au 3 mars 2018.

Nous remercions chaleureusement les élèves de l’Athénée Royal Leonardo da Vinci, située à Anderlecht, et leur directrice adjointe, Mme Chloé Van Lancker, pour leurs présences à la pose des pavés au 173 rue Haute et pour leur lecture de textes préparés pour cette occasion.

Rue Haute, 255

Informations et diffusions de l’activité
• La tenue de l’événement a été annoncée via une invitation (newsletter) auprès de l’ensemble des membres et des personnes inscrites dans le fichier d’adresses de Mémoire d’Auschwitz asbl.
• L’activité a été annoncée sur le site Mémoire d’Auschwitz asbl, par l’AMS et par la Ville de Bruxelles.
• Une description de l’activité ainsi qu’une galerie des meilleures photographies prises devant les écoles Émile André, Baron Steens, Charles Buls et devant le 173 rue Haute (voir exemples ci-joint) sera également ajoutée sur la page du site ainsi qu’un lien vers le reportage vidéo diffusé au JT de BX1 le 25 novembre 2019.
• L’Association pour la Mémoire de la Shoah diffusera les notices établies des pavés posés au 173 rue Haute sur le site internet suivant : https://stolpersteine-guide.de/suche

Conseils pour un prochain porteur de projet
De manière à permettre aux futurs porteurs de projet de le concrétiser au mieux, les conseils suivants, en terme de gestion du temps, pourraient aider à définir la méthode à suivre :

1) Détailler avec précision l’ensemble des tâches à effectuer.
2) Définir le calendrier des tâches le plus réalistement possible en prévoyant une marge de manœuvre (car certaines étapes peuvent prendre plus de temps qu’initialement prévu)
3) Ne pas attendre le versement de l’acompte du budget promis pour développer le projet. Ce qui suppose la nécessité, pour le porteur du projet, d’avancer les montants nécessaires (ou de faire patienter, avec leur accord, les créanciers).
4) Faire avaliser rapidement et au fur et à mesure les différentes étapes du projet par les personnes et autorités concernées.
5) Faire régulièrement le point avec le collaborateur communication de la cellule Bruxelles-Participation, Mr Lazarou, dont les conseils et le support sont essentiels, pour le démarrage et le suivi du projet.

Conclusion
Nous sommes très heureux d’avoir pu développer ce projet qui aura permis aux enseignants y ayant participé d’aborder avec leurs élèves non seulement l’histoire de la Seconde Guerre mondiale mais aussi les nombreuses thématiques induites, telles la diversité culturelle, le vivre-ensemble, la multiculturalité, le communautarisme, la tolérance, la résistance, l’accueil des réfugiés, le racisme, les extrémismes, les discriminations, la propagande, les manipulations, l’indifférence, le soutien à autrui, toutes questions permettant de réfléchir à la notion de démocratie.
Nous tenons à remercier vivement la Ville de Bruxelles pour avoir créé le Budget participatif permettant à des initiatives citoyennes de voir le jour, et pour les soutiens reçus, Mr. Lazarou et Mr. Manzone.