Les 5 pavés posés en hommage à la famille Frydman ont été commandités par le Centre Scolaire S2J, (le seul centre d’enseignement secondaire complet de Liège : secondaire général, immersion néerlandais, technique de qualification), situé rue Général Bertrand à 4000 Liège. Direction, professeurs et élèves ont suivi le projet mené par Philippe Renette, professeur de langues, réalisé avec le soutien de l’Association pour la Mémoire de la Shoah (AMS), des Territoires de la Mémoire et de la Fondation Auschwitz, qui chacun ont pris en charge le coût de l’un des pavés et participé à la cérémonie qui s’est déroulée au Centre Scolaire le 24 janvier 2020.

Voici le texte de l’annonce de l’événement mis en ligne par l’AMS sur le site de l’Agence Diasporique d’Information le 22 janvier 2020 (https://www.restitution.be/arti-20200122090822-liege_des_eleves_du_centre_scolaire_s2j_commemorent_une_famille_victime_de_la_shoah.html) :

« À Liège, le Centre Scolaire S2J, l’Association pour la Mémoire de la Shoah, Territoires de la Mémoire et la Fondation Auschwitz s’associent pour placer et inaugurer publiquement des Pavés de la Mémoire aux noms de David Frydman, de son épouse Hena Frydman-Kierkowski et de leurs enfants Frajdla, Szajndla et Charles victimes de l’antisémitisme nazi.
Le rendez-vous ouvert à tout public est fixé vendredi 24 janvier à 13h, au Centre Scolaire Libre S2J, 14 rue Général Bertrand, à Liège. C’est là que débuteront les cérémonies d’hommage à la famille Frydman-Kierkowski dont tous les membres, à l’exception de Frajdla, ont été assassinés dans les camps. Les partenaires du projet rappelleront, notamment aux élèves, l’importance de la mémoire de la Shoah et de la lutte contre le racisme et contre l’antisémitisme.

David Frydman et Hena Kierkowski, Juifs natifs de Pologne (Czestochowa et Przyrow) émigrèrent à Liège en 1929, à Tilleur puis à Glain, où le chef de famille exerça comme coiffeur. En 1942, lors de la déportation des Juifs d’Europe, la famille comptait trois enfants âgés de 14, 12 et 9 ans. Ils habitaient au 164 rue Sainte-Marguerite.

Le nom et l’adresse de David Frydman, le père de famille, avait été docilement livré par l’administration communale de Liège à l’occupant nazi, lequel l’a déporté pour travailler à l’érection du mur de l’Atlantique au camp de Dannes-Camier, avant de l’envoyer à Auschwitz par le XIe convoi.

Son épouse Hena Frydman-Kierkowski et ses 2 enfants cadets, Szajndla – 12 ans et Charles – 9 ans, ont été arrêtés à leur domicile le 11 septembre 1942, alors que Frajdla, l’aînée âgée de 14 ans avait été cachée chez des voisins. Conduits au « centre de transit » installé dans la caserne Dossin à Malines, ils en seront déportés dès le lendemain par le IXe convoi vers Auschwitz, où ils furent assassinés.

Frajdla sera arrêtée, vraisemblablement sur dénonciation, un an plus tard, le 21 novembre 1943. Elle sera déportée à Auschwitz par le XXIIIe convoi du 15 janvier 1944, où son père avait été également déporté entretemps. Frajdla survivra à un an de camp et à la marche de la mort, alors que son père y succombera à la fin de la guerre.

C’est à leur adresse, 14 rue Général Bertrand, située à deux cents mètres de l’école, non loin de la gare des bus TEC empruntée quotidiennement par plusieurs centaines d’élèves, que les 5 Pavés de Mémoire seront inaugurés. Le choix de ces victimes a été murement réfléchi par les promoteurs de ces pavés : trois enseignants du Centre Scolaire Libre S2J. Il vise à ancrer le plus possible le travail de mémoire dans le quartier et le quotidien de leurs élèves.

Des élèves adolescents ont préparé l’inauguration à laquelle ils participeront activement. Lecture sera faite de plusieurs textes de référence (Albert Niemöller, Charlotte Delbo). Les parcours des vies des cinq membres de la famille Frydman seront rappelés. L’événement s’inscrit ici dans une démarche mémorielle profonde et intense dont la préparation pédagogique commencée il y a un an, a conduit les élèves à rencontrer des témoins de l’époque (Simon Gronowski et Paul Sobol) ; à se rendre à Malines au Musée Kazerne Dossin comme au Fort de Breendonk et à préparer activement un voyage à venir de 4 jours en Pologne (Cracovie, Plaszow et Auschwitz-Birkenau) prévu durant le congé pascal d’avril 2020. Le fait que les élèves du Centre Scolaire Libre S2J soient issus de cultures, de langues maternelles et de confessions différentes, donne une force et une profondeur particulière au projet.

Les Pavés de la Mémoire offrent aux professeurs et aux élèves l’opportunité de s’investir dans une démarche mémorielle au cœur même de leur ville, dans le quartier qu’ils habitent et/ou fréquentent l’école. Ils permettent de dépasser le stade de l’abstraction (le nombre de victimes) en mettant un nom, un visage, un parcours de vie sur des destins précis et concrets. Ils rappellent la foi de ses promoteurs en une société multiculturelle, respectueuse de tous quelle que soit sa différence, sa singularité, sa richesse. Ils s’inscrivent enfin dans une série d’actions visant à dénoncer et à lutter contre le retour en force de l’antisémitisme et contre toute forme de racisme et d’exclusion. »

La cérémonie a débuté dans une salle d’accueil du Centre Scolaire S2J où se trouvait présentée une exposition constituée de documents historiques relatifs à la famille – les parents et les trois enfants de 14, 12 et 9 ans – sous forme de portraits.

Des prises de parole se sont succédées, de la part de la direction, de professeurs et élèves du Centre Scolaire, ainsi que des représentants des associations partenaires de l’événement.

Au moment de la pose des pavés, rappel des identités et des parcours de vie des 5 membres de la famille Frydman a été fait, accompagné de lectures de textes et de poèmes présentés par des élèves.

L’article « Pavés de Mémoire » mis en ligne sur le site du Centre Scolaire S2J rend compte des motivations ayant animé le projet et présente un remarquable ensemble de photographies prises durant la cérémonie (à voir à l’adresse https://www.s2j.eu/photos/paves-de-memoire-2/) :

« Ce 24 janvier 2020, moment symbolique s’il en est puisque nous sommes en pleine commémoration du 75ème anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau, une trentaine de nos élèves ont inauguré 5 « Pavés de Mémoire » rue Sainte-Marguerite. David, Hena, Charles, Szajndla, Frajdla Frydman.

La Fondation Auschwitz (partenaire de notre opération), « les Territoires de la mémoire » (collaborateurs de nos actions de sensibilisation depuis de nombreuses années), l’Association pour la Mémoire de la Shoah étaient représentés, ainsi que M. Louis Maraite, conseiller communal de la ville de Liège, et plusieurs personnes pour qui le devoir de mémoire est un acte essentiel nous avaient également rejoints pour l’occasion. Notons la présence de Marcel Frydman, homonyme de la famille mise en lumière ce jour, mais, surtout, enfant caché pendant la Deuxième Guerre mondiale. Une rencontre émouvante pour tous.

Poser des Pavés de Mémoire, c’est faire resurgir le passé, mais c‘est également prévenir les générations actuelles et futures des dangers des extrémismes. La Shoah n’a pas débuté à Auschwitz, mais au seuil des maisons où ont été raflées des millions de personnes.
Par leurs lectures de ce vendredi et les discussions avec nos invités, les trente élèves qui partiront bientôt à Auschwitz, Birkenau, Plaszow et Cracovie l’ont très bien compris, l’ont très bien assimilé. Leur devoir de mémoire se construit de connaissances, de découvertes, de rencontres, mais également d’actes engagés.

Il devient facile pour nous, les Colibris de la mémoire de notre Centre Scolaire, de les accompagner, c’est d’ailleurs un plaisir et un honneur.

Reconnaissance également d’un geste fort pour Liège, la présence des médias et la diffusion des reportages à la télévision (RTC), la radio (La Première et Vivacité), et dans les journaux tels Le Soir, La Libre Belgique, La Meuse, Vers L’Avenir, La Dernière Heure, 7/7 …

N’oublions jamais ! »

 

A noter également, la séquence vidéo du Soir en ligne « Cinq pavés en mémoire d’une famille juive déportée pendant la guerre inaugurés à Liège (vidéo) » du 24 janvier 2020 : https://www.lesoir.be/275284/article/2020-01-24/cinq-paves-en-memoire-dune-famille-juive-deportee-pendant-la-guerre-inaugures

Les inscriptions gravées sur les 5 pavés sont les suivantes :

Pavés Famille FRYDMAN - Rue Sainte-Marguerite, 164 à 4000 Liège
ICI HABITAIT
HENA FRYDMAN-KIERKOWSKI
NEE 1905 POLOGNE
ARRETEE 11.9.1942
DETENUE MALINES
DEPORTEE 1942
AUSCHWITZ
ASSASSINEE
ICI HABITAIT
SZAJNDLA FRYDMAN
NEE 1930 POLOGNE
ARRETEE 11.9.1942
DETENUE MALINES
DEPORTEE 1942
AUSCHWITZ
ASSASSINEE
ICI HABITAIT
CHARLES FRYDMAN
NE 1933
ARRETE 11.9.1942
DETENU MALINES
DEPORTE 1942
AUSCHWITZ
ASSASSINE
ICI HABITAIT
DAVID FRYDMAN
NE 1905 POLOGNE
DEPORTE FRANCE AOUT 1942
ORGANISATION TODT
DETENU MALINES 1942
DEPORTE AUSCHWITZ
MARCHE DE LA MORT
ASSASSINE
ICI HABITAIT
FRAJDLA FRYDMAN
NEE 1928 POLOGNE
ARRETEE 21.10.1943
DETENUE
CITADELLE LIEGE – MALINES
DEPORTEE 1944
AUSCHWITZ
MARCHE DE LA MORT
RESCAPEE